A l’occasion de la parution en France le 19 avril dernier de son nouveau livre Le capitalisme patriarcal, Erwan Duchateau pour lesinrocks.com publie un entretien avec l’universitaire, enseignante et militante Silvia Federici.
Au cours de cet échange, l’auteure de Caliban et la sorcière. Femmes, corps et accumulation primitive, revient sur les paradoxes de Karl Marx, mais aussi sur ce que la reprise des travaux de Marx par les mouvements féministes pouvait amener comme critique d’un capitalisme qui a toujours cherché à contrôler la femme pour la mettre à la marge, dans le but de servir le profit.
Une partie de cet entretien restitue la manière dont la pensée critique de Silvia Federici traverse des problématiques qui touchent aux politiques des communs. Extrait :
Pour parler de la politique des communs, dont vous faites la promotion dans vos travaux, comment s’assurer que dans la mise en place d’un espace autogéré, l’oppression des hommes sur les femmes ne refasse pas surface ?
Je crois que le mouvement des communs comme il existe aujourd’hui en Amérique latine est important parce qu’il permet aux gens d’avoir accès à la terre collectivement. Pourtant, certains d’entre eux ont un fonctionnement patriarcal. Et il y a une lutte importante dans tous ces mouvements pour que les femmes puissent accéder à un statut égalitaire. Mais lorsqu’on parle de la politique des communs, on doit comprendre qu’on parle en regardant le futur. Et qu’on ne parle pas seulement d’un territoire, mais d’un principe d’organisation sociale. La faiblesse de beaucoup de mouvement a été l’incapacité de s’organiser sans séparer la reproduction quotidienne de la lutte. Alors que les communs permettent, je pense, de reconstruire la fabrique sociale pour mettre la vie ensemble et créer des formes de reproductions plus responsables, en tendant vers cette égalité que nous n’avons pas partout aujourd’hui. Les luttes des femmes en Amérique latine sont très fortes parce qu’elles sont conscientes de cette nécessité de coopération. La conception du commun est une vision du monde pour le futur, une idée de l’égalité, une forme d’autogouvernement sans structure dominante. Et je crois que cela peut exister aujourd’hui. J’ai vu dans beaucoup de pays s’organiser des luttes féroces contre les grands groupes industriels. Et ces gens en lutte, qui savent s’organiser de façon égalitaire à tous les niveaux, vivent déjà le commun.
=> lire la source www.lesinrocks.com
Pour aller plus loin :
- Silvia Federici, Feminism And the Politics of the Commons
- Öznur Karakass, Une approche féministe de l’accumulation primitive. Notes sur Caliban et la sorcière de Silvia Federici
Rencontres avec Silvia Federici, à l’occasion de la parution de l’ouvrage Le capitalisme patriarcal :
- Silvia Federici à la librairie L’Atelier (Paris 20)
jeudi 16 mai, 20h
2 bis rue du Jourdain - Silvia Federici à Lyon
vendredi 17 mai
à 19h à la librairie Terre des Livres, 86 rue de Marseille (69007 Lyon) - Silvia Federici à Marseille
samedi 18 mai
19h à la librairie L’Hydre aux mille têtes, 96 rue Saint-Savournin (13001 Marseille) - Silvia Federici à Toulouse
mardi 21 mai
à 19h à la librairie Terra Nova (18, rue Gambetta, 31000 Toulouse) - Silvia Federici à la librairie Libralire (Paris 11)
mercredi 22 mai
à 19h, 116 rue Sant-Maur (75011 Paris) - Silvia Federici à Strasbourg
jeudi 23 mai
à 19h à la librairie Quai des Brumes, 120 Grand’Rue (67000 Strasbourg)