“Faire des communs numériques un outil majeur de l’action publique territoriale.” Voilà qui pourrait résumer l’ambition du ministère de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales pour les deux prochaines années. Dans sa feuille de route “Données, codes sources et algorithmes”, dévoilée le 27 septembre en même temps que celles des autres ministères, il ne fait pas que dérouler son plan d’action, il décrit comment il compte faire de l’ouverture des données et codes sources (le code informatique d’un logiciel) un axe stratégique de son développement et du nouveau rapport que veut entretenir l’État avec les collectivités.
Un rapport moins vertical et davantage partenarial qu’essaie d’incarner l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) depuis sa création, en janvier 2020, à travers des programmes comme “Nouveaux lieux, nouveaux liens”, “Inclusion numérique”, “Action Cœur de ville”, ou bien encore avec la création de son “incubateur des territoires”. D’ailleurs, la feuille de route est appelée à évoluer au fil de l’eau, en concertation avec les associations d’élus et de collectivités locales.
Si la plupart des ministères ont bien compris la leçon sur l’ouverture et surtout l’exploitation des données pour améliorer l’action publique, la Cohésion des territoires est celui qui reprend sans doute le plus l’esprit de la circulaire du Premier ministre sur la politique de la donnée du 27 avril dernier. Ce dernier avait d’ailleurs spécifiquement confié à l’ANCT une mission d’animation et d’appui à l’ouverture des données et codes sources des collectivités. Le ministère souhaite ainsi ouvrir et faire circuler les données et codes sources pour à la fois “améliorer l’efficacité de l’action publique”, “favoriser la transparence et stimuler la démocratie” et “favoriser la création de valeur économique”, mais aussi “favoriser la circulation des données entre l’État et les collectivités locales et participer à la création de communs numériques”. À ce titre, l’action du ministère dépasse son seul périmètre puisqu’il s’agit aussi d’inciter et d’accompagner les collectivités dans le partage de données avec l’État, mais aussi entre elles.
Catalogue d’applications
La feuille de route vient consacrer une stratégie déjà amenée à maturité ces derniers mois et qui consiste à “se placer dans une logique d’accompagnement” des collectivités, aussi bien en ingénierie qu’en outils numériques et ressources partageables. L’ANCT s’est déjà largement emparée des “communs numériques”, ces ressources numériques dont la licence et le code libres permettent une plus grande diffusion. Son incubateur des territoires s’inscrit pleinement dans cette logique, avec le développement d’un catalogue d’applications dans lesquelles les collectivités sont libres de piocher, pour se les approprier et les ajuster à leurs besoins. Tout comme le plan de relance.Sur les 88 millions d’euros fléchés vers la mise à niveau numérique des collectivités, 30 millions sont réservés à la coconstruction de services numériques après une phase de recueil de besoins. Tous ont vocation à être en open source et donc librement réutilisables par l’ensemble des collectivités qui le souhaitent. Mais pour le ministère, cette démarche de recours et de contribution aux logiciels libres doit encore “être amplifiée et gagner en visibilité”.Le ministère établira par ailleurs une cartographie des bases de données et codes sources relevant de son champ et de celui de ses agences et établissements, pour ensuite identifier lesquels ouvrir en priorité. Deux nouveaux référents seront nommés, l’un sur les sujets liés aux codes sources, et l’autre sur la question des algorithmes, chargé de faire l’inventaire des algorithmes du ministère, d’identifier ceux qui mériteraient d’être ouverts et expliqués en priorité, et d’aider les collectivités à faire de même.
Communauté locale de la donnée
La feuille de route retient également toute une série de mesures pour aider les collectivités à mettre en œuvre elles-mêmes cette logique d’ouverture. L’ANCT mettra notamment à leur disposition des clausiers-types afin de systématiser l’ouverture de données et codes sources dans le cadre de leurs marchés publics et délégations de service public, ainsi qu’un outil de cartographie de leurs propres bases de données.
Elle prévoit aussi la conception, d’ici 2023, d’un nouveau système d’information territorial unique (SIT), afin de fournir aux territoires un outil clés en main d’observation et de pilotage des dynamiques territoriales, à partir de différentes sources de données des collectivités : données métiers, système d’information géographique… Une manière, aussi, de mutualiser les outils et d’harmoniser les formats de données pour faciliter leur circulation. L’Agence réassume à ce titre une partie des missions que s’était appropriées l’association OpenData France dans l’animation d’une communauté locale de la donnée et l’accompagnement des collectivités (en l’étendant aux codes sources et algorithmes) : organisation d’événements d’échange, sensibilisation et formation des acteurs locaux, boîte à outils méthodologique, développement et mutualisation des outils, standardisation des données…