Depuis plusieurs années, le concept de « Buen Vivir » (bien-vivre) fédère de nombreux mouvements en Amérique, notamment portés par des populations indigènes, qui s’opposent aux politiques « développementistes » imposées par plusieurs Etats et reposant sur la surexploitation des ressources. Le « Buen Vivir » accorde au contraire une approche attentive à la durabilité des ressources et à la qualité de vie. Cette approche est particulièrement active dans des pays comme l’Equateur ou la Bolivie, et elle progresse également au Venezuela, à Cuba et dans les communautés zapatistes autonomes du sud-est du Mexique.
Dans plusieurs pays, elle s’est déjà traduit par des avancées qui recoupent largement la question des Communs.
- En Equateur (où le Buen Vivir s’appelle le sumak Kawsay)
En septembre 2008, 64% des votants équatoriens ont adopté une nouvelle Constitution dont le préambule déclare vouloir construire “une nouvelle forme de coexistence citoyenne dans la diversité et l’harmonie avec la nature, afin de parvenir au sumak kawsay“. Ce texte de loi fondamental est ainsi le premier au monde à reconnaître, dans la ligne de la cosmovision andine, les droits de la nature. L’environnement n’est plus considéré comme quelque chose que l’on s’approprie, que l’on exploite jusqu’à sa dégradation et sa disparition pour s’enrichir. L’Etat a ainsi le devoir de veiller au respect intégral de son existence, de son entretien et du renouvellement de ses cycles vitaux, de ses fonctions et de ses processus évolutifs. La nature possède un droit à la réparation. L’Etat doit prendre des mesures de protection, en particulier à l’encontre des diverses activités pouvant conduire à la disparition des espèces animales et végétales et de leur patrimoine génétique. De nombreuses dispositions ont été prises pour traduire dans la pratique le concept de sumak kawsay. Parmi elles, on trouve la reconnaissance du droit inaliénable de l’eau, l’autorisation aux peuples originaires de former des circonscriptions territoriales avec les compétences d’un gouvernement autonome, ainsi que le droit de ces peuples de maintenir leur identité culturelle et la promotion de leur patrimoine culturel.
- En Bolivie :
Sous l’impulsion de son président Evo Morales, a intégré en 2009 les priorités du Buen Vivir dans sa Constitution “interculturelle, pluriethnique et plurinationale”. Les articles constitutionnels boliviens 346 et 347 stipulent que les ressources naturelles relèvent de la priorité sociale directe indivisible et imprescriptible du peuple, dont la gestion revient à l’Etat. Dans les faits, elles deviennent des biens communs. L’article 371 établit que les ressources hydriques ne peuvent faire l’objet d’une appropriation privée.
- Au Venezuela :
Au Venezuela, les concepts d’écosocialisme et de ‘bien vivre’ ont été intégrés dans les plans du gouvernement. Une démarche dénommée “mission arbres” a ainsi été créée en 2006. Des conseils communaux peuvent désormais décréter que les forêts sont des zones protégées. Des milliers de comités, financés par l’Etat et autogérés, assurent aujourd’hui la maîtrise collective de l’environnement. Plus de 40 millions de plants issus d’espèces indigènes ont été plantés dans tout le pays et plus de 30’000 hectares ont été reboisés dans le cadre des “journées populaires de plantation ».