Du 28 septembre au 1er décembre 2018, activation de L’Ambassade des communs, commande Nouveaux Commanditaires à Contexts, 49 rue Ramponeau, 75020 Paris.
L’Ambassade des communs est une œuvre collaborative initiée par Claire Dehove / WOS /agence des hypothèses dans le cadre d’une commande Nouveaux Commanditaires (groupe d’étudiant.e.s et d’enseignant.e.s,) à la Maison des Arts de l’Université Bordeaux-Montaigne, Pessac. Cette commande, soutenue par la Fondation de France et la Direction Régionale des Affaires Culturelles Aquitaine, a été menée avec la médiation de l’association Pointdefuite (Pierre Marsaa et Marie Anne Chambost).
L’Ambassade des communs investit durant deux mois l’espace de CONTEXTS dont elle fait provisoirement sa plate-forme de documentation et de réflexion à Belleville, Paris.
Cette étape lui permet de mettre à disposition publique son corpus d’Anarchives rassemblé au fur et à mesure de la constitution de la communauté d’Ambassadeur.rice.s et des recherches, activités et événements collectifs générés au cours des différentes phases de la commande à la Maison des Arts.
Le film L’Ambassade des Communs,, en tant qu’anarchive audiovisuelle, met en évidence le mouvement communautaire et la dynamique que l’Ambassade a engendrés, y compris dans le campus universitaire de Bordeaux. Il est aussi chaque année un outil pour la passation des responsabilités au sein de l’UDC.
En partant de cette commande Nouveaux commanditaires et en s’appuyant sur le processus développé par L’Ambassade des communs, Claire Dehove/WOS/agence des hypothèses souhaite interroger les conditions d’existence – notamment juridiques et contre-institutionnelles – de ce type d’œuvre issue de manœuvres communautaires ainsi que les multiples incidences de pratiques artistiques axées sur des usages citoyens et liées à la philosophie et la culture des Biens Communs.
Les Ateliers-Débats constituent une activation spécifique de L’Ambassade des communs en tant que rencontre de nouveaux Ambassadeur.rice.s Chargé.e.s d’Affaires pour la production théorique de l’ADC, habilités et appelés à débattre ensemble de ces questions. Leur communication sera discutée collectivement avec toutes les personnes présentes. L’ensemble des récits livrés lors des débats est considéré comme une œuvre performative de L’Ambassade autour de « l’art des Communs ». Les débats sont enregistrés et publié en ligne par la revue Sens Public sous l’égide de Nicolas Sauret et Sylvia Fredriksson. Ils seront ensuite la matrice d’un livre.
Programme complet : PDF
L’Ambassade des Communs, de WOS/agence des hypothèses
Par Claire Dehove & Camille Olivier. Vidéo, 15’, 2018, images et sons : Claire Dehove, Julie Boillot-Savarin, Charlotte Morel, Hélène Marin, Collectif Composite, Nicolas Loubère/Radio Campus, Cartoons found footage
VENDREDI 28 SEPTEMBRE VERNISSAGE à partir de 18h30
16h00 -18h30 ATELIER-DEBAT 1
Facilitatrices Cristina Bertelli et Claire Dehove
Cette soirée initiale réunit tous.tes les participant.e.s autour de la série d’HYPOTHESES proposées par Claire Dehove et élaborées à partir des résumés des interventions de chaque nouvel.lle ambassadeur.rice. Elizabeth Magne, Cristina Bertelli, Marie Cornu, Charlotte Morel, Sylvia Fredriksson, Violaine Hacker, Eric Létourneau, Camille Olivier, Gilles Yovan, Pierre Marsaa, Mari Linnman, Victoire Dubruel et Claire Dehove.
SAMEDI 29 SEPTEMBRE
18h00 – 20h ATELIER-DEBAT 2
Facilitatrices Sylvia Fredriksson et Claire Dehove
Elisabeth Magne, Charlotte Morel, Sylvia Fredriksson, Pierre Marsaa, Mari Linnman, Victoire Dubruel et Claire Dehove.
Elisabeth Magne, Les arts à l’université : Le pari d’un modèle de vie commune
La rénovation d’un bâtiment dédié à l’enseignement des arts (arts plastiques, design, cinéma, théâtre, musique, danse) a pointé la difficulté à fédérer une communauté de vie et de recherche créative autour d’un lieu contraint. L’engagement dans une démarche « nouveaux commanditaires » a été porté avec le désir de créer du lien et de la pensée commune au-delà des temps d’enseignement disciplinaire. Aujourd’hui, l’essaimage s’est poursuivi à l’échelle de l’université dans son ensemble et structure les chantiers du vivre ensemble. Fondé sur des logiques alternatives, le modèle affiche ses valeurs partageuses et collaboratives.
Charlotte Morel, Design des communs, un design « ouvert »
L’implication des étudiants en design à la conception d’une communauté et d’un lieu de vie collective nous a conduits à poser ces questions : Comment concevoir une communauté et un lieu de vie collective ? – Qu’est ce que le design des communs ? Mon mémoire de recherche porte sur les régimes de conception « fermés » et « ouverts » que j’ai proposé de nommer régimes de conception « impératif » et « interrogatif ». Ces deux approches de la conception laissent apparaitre des objets plutôt fermés ou plutôt ouverts et renvoient aux « dispositifs » et « appareils » théorisés par Michel Foucault et Pierre Damien Huyghe.
Le projet de la Petite Maison des Communs et L’Ambassade des Communs elle-même exemplifient de tels modes de conception. Qu’il s’agisse d’imaginer la charte d’une communauté, sa structuration, son organisation et les relations entre ses membres, ou de projeter le fonctionnement et la forme d’un lieu de vie collective, le concepteur et les parties prenantes cherchent à inviter au partage, au commun, tout en opérant des choix de conception en lien avec les enjeux de faisabilité, de viabilité et désirabilité.
Sylvia Fredriksson, Milieux communs : une approche documentaire
Les communautés des communs sont activement engagées depuis une dizaine d’années dans des processus d’écriture et de documentation qui témoignent d’une certaine forme de politisation des communs. Écrits scientifiques, wikis communautaires, ou autres émergences de médias, les communs traversent ce moment particulier où la pensée et les principes des communs, après s’être incarnés dans le commoning (la pratique des communs), cherchent aujourd’hui à s’incarner dans l’écriture et sa publication. Les commoners tentent maintenant de connecter des initiatives locales et de disséminer le commoning à tous les aspects de la vie sociale. L’écrit joue un rôle essentiel dans l’échange et le partage d’expérience Il est aussi un déploiement de discours et une politisation des communs nécessaires à leur généralisation. Cette étude des stratégies de construction de l’espace public politique par la production sémantique et documentaire s’appuie sur le Lexique des communs et l’Atlas des chartes des communs urbains.
Claire Dehove, HYPOTHESES à débattre
JEUDI 4 OCTOBRE
18h00 – 21h ATELIER-DEBAT 3
Facilitatrices Mari Linnman et Claire Dehove
Eric Létourneau, Cristina Bertelli, Pierre Marsaa, Victoire Dubruel, Mari Linnman et Claire Dehove.
Eric Létourneau, De l’induction à la transduction
Géotransgression : néologisme désignant l’usage ou l’occupation d’un espace public sans permission préalable Un acte de géotransgression se cristallise à travers des réflexions, des événements, des
gestes, des processus déductifs et inductifs qui influent à la fois sur sa genèse, sa réalisation concrète et son devenir. Les dimensions politiques, médiatiques, sociales, philosophiques, démographiques, transpersonnelles et juridiques s’y rencontrent tout en se dynamisant dans un processus sans cesse évolutif. On tente ici de mieux comprendre la nature spécifique de cette dynamique et des processus mis en oeuvre dans différents actes géotransgressifs en mobilisant notamment les concepts d’individuation et de transduction du philosophe Gilbert Simondon.
Cristina Bertelli, Utopies à réaliser ou utopies réalisées ?
L’utopie n’est pas ce que nous ne pouvons pas réaliser, mais ce que le système ne veut pas qu’on réalise. La condition d’une utopie est le changement de notre imaginaire, des imaginaires sociaux, artistiques, politiques eux mêmes. Edouard Glissant parle de la difficile mais nécessaire « insurrection de l’imaginaire ». C’est un tel changement utopique qui s’est réalisé à Librino, quartier populaire de Catane, à travers un fructueux processus de développement de projets artistiques impliquant la population. Entre Librino et l’Ambassade des Communs de Pessac, les analogies ne manquent pas qui permettent d’interroger l’art des biens communs.
Claire Dehove, HYPOTHESES à débattre
VENDREDI 19 OCTOBRE
18h00 – 21h ATELIER-DEBAT 4
Facilitatrices Victoire Dubruel et Claire Dehove
Violaine Hacker, Camille Louis et Claire Dehove, Pierre Marsaa, Mari Linnman, Victoire Dubruel
et Claire Dehove.
Violaine Hacker, Les Biens Communs dans la philosophie du Bien commun
Comme le montre le film Ambassade des Communs, la gouvernance des biens communs peut être perçue sous différents angles :
1 Les divers modes de gouvernance des ressources.
2 La recherche de l’équilibre entre épanouissement de la Personne et utilité sociale dans la communauté.
3 L’efficience réelle des choix communs.
4 Les multiples perceptions du savoir commun (et ses conséquences sur notre conception des modes démocratiques, du Droit, et plus largement des politiques publiques de l’économie). De nombreux outils conceptuels aident à comprendre ces pratiques. La Philosophie occidentale du Bien Commun et celle africaine de l’Ubuntu, mettent en lumière ces perspectives.
Camille Louis, Fabrique du commun VS production du comme Un
Puisqu’il s’agira de rendre compte de ce que peut générer l’articulation complexe et riche de singularité et commun – qui, philosophiquement s’oppose à celle de particulier et général – cette intervention entend partir d’une expérience singulière : celle que je mène depuis plusieurs années sous le nom de Fabrique du commun.
Ce dispositif conversationnel proposé dans des contextes politiques, géographiques, culturels divers (d’Haïti à Buenos Aires en passant par Bogota, Montréal, Athènes et bientôt Calais) entend à chaque fois réunir des singularités qui, précisément, n’ont rien en commun afin qu’elles fassent l’épreuve non pas du consensus que nos sociétés présentent comme nécessaire au collectif, mais plutôt celle du dissensus que la politique de l’égalité met au centre de toute construction démocratique. Au croisement de l’esthétique et du politique, comment pouvons-nous aujourd’hui, au temps des violences policières répétées, nous ressaisir, ensemble et singulièrement, de la puissance du conflit poétique ?
Claire Dehove, HYPOTHESES à débattre
JEUDI 29 NOVEMBRE
18h00 – 21h ATELIER-DEBAT 5
Facilitateur.rice Pierre Marsaa et Claire Dehove
Marie Cornu, Gilles Yovan, Pierre Marsaa, Mari Linnman, Victoire Dubruel et Claire Dehove.
Marie Cornu, Quel dialogue possible entre droit d’auteur et communs ?
On pourrait penser tout dialogue impossible dans la mesure où d’un côté le droit d’auteur distribue un droit exclusif, une propriété individuelle au seul créateur et de l’autre les communs renvoient à l’idée d’une ressource mise en partage. Et pourtant, le droit d’auteur contient intimement une part de commun. La mise en forme d’exceptions, l’aménagement d’un domaine public en sont les marqueurs principaux. Du point de vue des communs, en outre, cette figure à finalité collective trouve à s’exprimer sur des biens appropriés. Il n’y a pas nécessairement d’antinomie entre la propriété et le commun. On peut cependant avancer que les conditions de ce dialogue sont aujourd’hui sérieusement perturbées, en particulier par la progression constante de la logique privative du droit d’auteur. Précisément le regain d’intérêt autour de la figure des communs, dans les milieux académiques comme dans la pratique, manifeste une forme de riposte à ce qui est désigné comme une dérive propriétariste. Et le système, en effet, produit un certain nombre de blocages à la production et à l’accès à la connaissance, aux innovations, aux oeuvres. Assurément, aujourd’hui on peut affirmer que le seuil d’acceptabilité de ces droits réservataires a été franchi. La reconnaissance positive du domaine public entendu comme sphère de libre parcours compte parmi les réflexions sur la possible restauration d’un équilibre. C’est cette figure du domaine public sur laquelle je voudrais revenir.
GillesYovan, Vous avez dit commun ? L’autorat entre piraterie et détournement
L’auto-diffusion de la production culturelle et artistique, permise par le cyberspace, a pour contrepartie, selon certains, de livrer sans frais au pillage et au plagiat – plus qu’au partage en commun – des formes que leurs auteur-e-s auront omis de protéger. Internet a amplifié – jusqu’à la noyade généralisée d’ailleurs – la circulation des œuvres, mais aussi un réseau d’échanges, et d’émulation. De là se produit une co-influence démultipliée entre auteurs et destinataires qui vient féconder jusqu’au vertige une création artistique devenue inquantifiable. Nul droit de propriété intellectuelle ne saurait solder et rémunérer au final cette production artistique. En effet les procédures de cryptage, de détournement et de piraterie sont des pratiques qui parviennent aisément à contourner le sacro-saint droit d’auteur par lequel une œuvre monnaie jalousement sa valeur d’usage, en réfère à sa propre exclusivité et manifeste son allergie à toute logique de don/contre-don ; usages salutaires – et non appropriations abusives – stimulant la créativité des destinataires de toute œuvre.
Claire Dehove, HYPOTHESES à débattre