Un article du chercheur Michel Renault dans la revue « Projet », qui revient sur l’histoire des biens communs, leur renaissance actuelle et leur extension à une possible politique du Commun :
La réinvention des communs à laquelle nous assistons, de façon confuse, partielle, anarchique, impose de redécouvrir le sens des mots et des actes. « Bien » revêt un sens matériel de chose ou de service, mais aussi un sens moral renvoyant au juste, au vrai, au beau. « Commun » renvoie à une liberté d’accès, d’usage, s’exerçant à l’égard des « choses » mais aussi à un « monde commun » fondé sur la communication, le dialogue. Le monde commun apparaît alors comme une narration collective qui donne un sens à la condition humaine. Dépasser la privatisation, au double sens du mot, oblige à (re)définir ce qui compte, non au sens dominant lié à la possibilité de quantifier et de mettre en nombre, mais au sens d’engagement moral visant à préciser les contours d’une « vie bonne avec et pour autrui ». Une telle perspective, loin d’exclure les autres, comme l’imposerait la tragédie des communs, amène au contraire à leur faire de la place. Les pratiques qui se développent pour réinstituer des communs essaient ainsi « de prendre en compte plus de personnes. » Une politique du commun doit s’inscrire comme un projet d’émancipation mettant chacun en capacité, y compris les plus pauvres, de s’affranchir de la sujétion imposée par l’ordre économique. Un projet encore à élaborer et à faire partager.
Source : site de la Revue Projet.